Sous le goudron !!! Les rails du tramway de La Rochelle

[Patrick ze rabbit Deludin]

Tu verras La Rochelle sous un autre angle la prochaine fois que tu franchiras le pont .

[pelican]

Super, comme toujours
Petite question : le matériel à air comprimé : c'était fiable ??

[rms olympic]

D'apparence, pour l'époque et les lignes desservis, en règle général, en ce qui concerne le système MEKARSKI : "oui", mais, assez rapidement, les évolutions vers la Traction électrique et, parfois les autobus, avaient généralement supplantés le système MEKARSKI.
Le "réseau de Nantes", lui, fut convertis à l'électricité à partir de 1913 (NB : alors que, curieusement, la distribution urbaine d'électricité commença dès 1892/94 et, assez rapidement généralisée sur la ville, les tramways, eux, attendront donc près de...20 ans avant d'en profiter !). Officiellement, la traction à air comprimé (sections encore non mises sous tension ) aurait été suspendu en 1917, mais il semble bien que vers 1915, l'exploitation des tramways à air comprimé fut pratiquement arrêtées ? -
Après 1918 : "Vichy-Cusset" et "La Rochelle" furent les seules exploitations encore assurées par des "tramways à air comprimé". Vichy disparut dès 1927, au profits d'autobus à essence, puis, peu avant, certaines sections du réseau de La Rochelle furent suspendus, enfin, l'axe La Rochelle à La Pallice, disparut en juin 1929, mettant ainsi un terme aux tramways à air comprimé en France.
A noter que dès 1927, l'exploitation des tramways, ainsi que des premiers autobus de La Rochelle, fut reprise par une "Régie Municipal des Autobus".

Pour assurer l'exploitation des tramways à air comprimé, le principal fut : l'installation d'usines de production d'air comprimé avec diverses contraintes techniques et, des canalisations acheminant l'air comprimé vers des terminus, parfois éloignés de l'usine de production. Il semblerait d'ailleurs que ces canalisations vieillirent assez rapidement, entraina des pertes de pressions aux postes de recharges. De plus les compresseurs étaient entrainés par des machines à vapeurs puissantes et consommant pas mal de charbon, d'où des dépenses en combustibles non négligeables.

[bzh44]

De ce que j'ai pu lire sur la question les motrices Mékarski étaient fiables et au point au moment de leur première utilisation en 1879 à Nantes. A l'époque une machine en bon état parcourait de 8 à 10 km entre 2 recharges.

Avec le temps et donc l'usure, surtout si la maintenance laissait à désirer on pouvait s'attendre à quelques détresses mais il semble bien qu'elles étaient bien moins nombreuses à ce que l'on a pu croire.

Le vrai problème était l'aspect économique. De son vivant Mekarski à toujours cherché à montrer que son système était comparable aux autres moyens de l'époque (vapeur), si la comparaison tenait tout juste la route cela était principalement dû à l'utilisation du coke sur les tramways à vapeur, plus cher et moins performant sur le plan calorique, comparé au charbon son système était moins économe. Notons que en 1898 la ville de Saint-Quentin se prononce pour l'emploi de motrice à air comprimé système Popp-Conti et que les essais catastrophiques obligèrent à se rabattre précipitament sur le système Mékarski alors bien rodé depuis l'expèrience nantaise (les motrices de Saint-Quentin on été prélevées sur le réseau Nantais) et les commandes récentes sur le réseau parisien de la CGO. Ce qui montre que ce sytème avait encore une certaine côte malgré la montée en puissance de la traction électrique alimentée par ligne aérienne.

On remarque que au fil du temps la pression de stockage à bord des automotrices est passée de 30 atmosphères en 1879 à 80 atmosphère pour les derniers modèles parisiens, il faut savoir que le rendement énergétique, et donc économique, baissait à mesure que la pression augmentait, par contre on gagnait en autonomie.

2 réseaux, dont celui de Bern, ont utilisé la force hydraulique (chute d'eau) pour faire tourner les compresseurs HP rendant le système particulièrement intéressant sur le plan financier, néanmoins la bataille sera évidement perdue face à la traction électrique, mais on peut dire que le système Mékarski a comblé avec succès - et une certaine élégance - une lacune technique entre la traction hippomobile et la traction électrique.

[Patrick ze rabbit Deludin]

Fiables oui mais... à la longue !
Il a fallu quelques années pour que les motrices ne soient pas obligées de "recharger" souvent en route, en augmentant la pression de l'air dans les réservoirs et d'autres procédés à base de vapeur d'eau expliqués là :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_M%C3%A9karski
Ce qui évitait de réaliser des réseaux enterrés d'air comprimé pour réalimenter les motrices en cours de route.
Comme je l'ai dit, les petites impasses qu'on trouve disséminées sur le réseau rochelais étaient peut-être là pour palier aux pannes en rangeant les automotrices incriminées sans gêner le trafic, ou comme stations intermédiaires de biberonnage.
Cela dit, elles ne sont pas très grosses et je ne les ai peut-être pas remarquées sur les vues aériennes ou photos diverses :

Les conducteurs, quant à eux, biberonnent au Muscadet, puisque ce cliché à été pris à Nantes.

Pour le reste, voir ce que les collègues ont écrit ci-dessus.

[bzh44]

L'injection de vapeur d'eau dans la "Bouillottte" est une des caractéristiques du système Mékarski et à été utilisée dès le départ sur les motrices. A l'époque, en tout cas dans les villes industrielles comme Nantes, fournir cette vapeur et air comprimé était chose facile, surement plus difficile dans des coins plus bucoliques .
Sur le réseau parisien le système de bouillote fut remplacé par un réchauffeur fonctionnant au coke dit "système Bonnefond". Un bon conducteur était reconnu à sa manière d'utiliser la réserve car contrairement à ce que l'on pourrait penser cette réserve était utilisée tout au long du parcours comme une sorte de booster pour les passages difficiles et amener un surplus de puissance à la demande. Les bons mécanos rentraient au dépôt avec 70% de la réserve disponible, les moins bons étaient presqu'à sec ....

[diabolo]

Les photos des rechargements avec l'air comprimé ne sont pas nombreuses du moins dans l'Allier.
Tramways Vichy Cusset.

[Patrick ze rabbit Deludin]

Passée la Grosse Horloge, nous allons faire le tour du port.
Cela commence par une grande boucle pour éviter la statue de l'amiral Duperré :

... puis suivre le quai... Duperré :

En 1921, voici à quoi ressemble cette zone :

Les travaux en cours permettent de compter les traverses sur une longueur de rail (à gorge) que je suppose de type Broca proche de 6 m. On y voit les traverses rapprochées près des joints, et les pavés déposés, sans doute pour remplacer des traverses bien qu'aucune, neuve ou détériorée, ne soit visible à proximité.
Le tramway franchit ensuite l'exutoire du canal Maubec, extrémité du canal de Marans à la Rochelle, dont la fonction n'est plus alors, et comme à présent, que de servir de chasse pour le dévasement du port, autrefois également assuré par une galerie de chasse et des ouvertures dans le quai en fond de port (le tracé en pointillé). Vous seriez étonnés de savoir tout ce qui se cache sous les pavés rochelais !

Puis il va suivre le quai Valin et son célèbre phare, après être passé au pied de la tour de Nesle (sans "s" final, nous n'avons pas les moyens comme à Paris ; détruite dans les années '30).
Vue vers le sud, depuis le canal Maubec et en direction de la "célèbre" porte St Nicolas :

... et vers le nord :

... et c'est en couleurs ! (enfin presque, je ne garantis rien ...).

Dans le rond orange du plan, il est probable que nous ayons une aubette, caractérisée par son toit.
Elle fait face à la voie principale et une voie d'évitement, mais cette fois pas de voie de garage :

Par contre, il est surprenant de ne pas trouver d'aubette aux environs de la Grosse Horloge, du moins n'en ai-je point vu .

[pelican]

Merci pour les précisions sur la fiabilité du système

[rms olympic]

Pour les passionnés de bateaux à vapeur, le navire à roues sur la vue ci-dessus est le "Jean Giton II", construit en Grande Bretagne, mis en service vers 1895 et qui navigua avec le Coligny (1876//1937) pendant une vingtaine d'années. Le "Jean Guiton" est reconnaissable, lui, avec sa cheminée en avant de l'axe des roues, alors que sur le Coligny, la cheminé, moins volumineuse, est placée, en arrière de l'axe des roues. Tous les deux disposaient, sur le pont arrière, d'un salon fermée et vitré, sans doutes de premières classes.

[Patrick ze rabbit Deludin]

En attendant que je revienne pour la suite, voici une belle vue aérienne de La Rochelle prise du sud (1923) :

... avec son parc Charruyer, sa Place d'Armes, sa cathédrale, ses tours médiévales (oui oui, la tour St Nicolas penche vraiment, c'était un architecte italien , et la tour de la Chaîne est en reconstruction), les restes de ses remparts, ses chantiers navals, son port, ses chasses, ses bateaux à voiles et à vapeur dont la Marie-Sal drague à godets dans le chenal, ses quais et, quelque part, un p'tit tramway qui se balade.

Je vous laisse en retrouver le tracé, voir si j'ai bien fait mon boulot !

Pour comparer, avant 1883, avec la tour de la Chaîne décoiffée, la guette, la tour à l'Anglais, l'église St Sauveur et la tour de Nesle :

... mais sans le tramway...

[agent001]

Un grand merci pour toutes ces archives et éclairages sur le fonctionnement du réseau

[Patrick ze rabbit Deludin]

Me revoilou !

Avant de repartir plein sud, une vue parfaitement datée du quai Valin prise depuis le Pont Neuf (voui, nous aussi : pont sur le débouché du canal Maubec).
On y distingue la fameuse aubette :

...le phare à mi-distance et, au premier plan, la tour de Nesle avec la trace de l'ancien rempart.

[Patrick ze rabbit Deludin]

Au sud du quai et en direction de la gare, le tramway passait devant la place et l'église St Nicolas, devenue aujourd'hui un hôtel :

(On distingue les rails au premier plan).
Puis on franchissait la "fameuse" porte Saint-Nicolas, si souvent photographiée, où la voie du tramway se dédoublait pour passer sous chaque arche. Au fond, le phare du quai Valin :

Le toit visible au-dessus du rempart, à gauche de la porte, est celui de l'ancien corps de garde.
Devant la muraille se trouvait non pas une aubette mais... une demi-pissotière !

Il y a eu beaucoup de transformations dans ce quartier, qui se nomme Saint-Nicolas depuis le milieu du Moyen-Âge.
En 1921, à l'occasion de la construction de la nouvelle gare (l'actuelle), la voirie va être revue avec la création de l'avenue de la Gare (actuelle avenue du Gal de Gaulle).
La porte St Nicolas est détruite, et une nouvelle pissotière, entière, est positionnée un peu plus au sud. Elle ne peut donc pas servir de point de repère.
1921, en pleine démolition (le bastion n'est encore que peu affecté) :

1923, il reste quelques ouvrages liés au bastion St Nicolas et à l'ouvrage à cornes associé (vue du sud) :

On remarquera que le tracé du tramway n'est pas modifié, car il desservait initialement le première gare :

L'aubette, à gauche du cliché, comporte les lettres "..WAYS", ce qui ne fait aucun doute quant à sa destination.
Une vue aérienne générale aide à mieux comprendre :

Dans le cercle orange, l'aubette de la gare, l'ancienne.
Je copie ici les plans donnés dans l'inventaire ferroviaire :

[Patrick ze rabbit Deludin]

J'ai mis du temps à reporter tout ceci sur une vue aérienne moderne, l'objectif étant de retrouver l'emplacement du cliché passé par Vic en début de sujet :

Les vestiges devaient être dans le rond rouge :

La porte Saint-Nicolas, porte de la Gare (l'ancienne), ou porte Napoléon car établie en 1857 avait été percée dans le rempart du gabut.
Mêlant le style plus ou moins roman avec du gothique massif, elle ne m'a jamais paru être du plus heureux effet.
Et alors en "couleurs d'époque", vous m'en direz des nouvelles :

Et après la tour de Nesles et le Pont Neuf, vous admirerez le blason de la commune, toujours d'actualité, trônant ostensiblement sur le tympan entre les 2 passages. Déjà vu ça quelque part ...

Avant elle, une première porte St-Nicolas avait été ouverte au début du 13e siècle dans le rempart médiéval :

On voit le clocher de l'église St-Nicolas en arrière plan.
Noyée dans les remblais et glacis du bastion édifié au 18e siècle, ses vestiges en furent détruits au moment de l'aplanissement du terrain en vue de libérer l'espace devant la nouvelle gare :

Et en plus, z'en sont fiers !!!
Bon, c'est vrai qu'à l'époque, la sauvegarde du patrimoine ancien, on s'en f♫♪tait royalement.
Et puis Viollet-le-Duc et Prosper Mérimée n'étaient plus là pour veiller au grain.

Non non, je ne suis pas hors sujet, y'avait du train à voie étroite pour l'occasion !